ORGANISATION
UNE RENTREE DES CLASSES AU XVI me SIECLE
CADRES ET PROFESSEURS.
LES CLASSES.


UNE RENTREE DES CLASSES AU XVI me SIECLE
A 435 ans d’intervalle, la " rentrée " n’a guère changé ! Et à lire le récit de la rentrée des élèves de l’Ancien Collège un matin d’octobre 1565, on se croirait dans la grande chapelle du Lycée Saint Joseph un matin de septembre 2000 ! !


Nous sommes le 29 Octobre 1565, c’est la Rentrée au Collège des Jésuites d’Avignon, ou plutôt, selon la terminologie de l’époque "l’Instauration" ("Instauratio Scholarum in lucalibus").
Depuis 8 jours des affiches portant ce titre annoncent sur les murs de la ville le programme de chaque classe et les livres nécessaires, à se procurer chez les libraires.
29 Octobre , 7h du matin : après avoir entendu la messe à la grande chapelle, 800 élèves franchissent le portail du collège et se regroupent sur les bancs de la salle des Actes (Salle de théâtre). Au 1er rang, sur des " faudesteuils " siègent les consuls de ville, l’archevêque, le légat, et le Père Recteur. Les Régents (pères enseignants) sont groupés au pied de l’estrade.
Tout commence par un grand discours en latin déclamé par le régent de Rhétorique (notre classe de Première). Les petits 6mes et 5mes (on utilisait déjà cette numérotation) sont loin de comprendre ce discours, mais cela leur donne un avant-goût de ce qui les attend !
Puis le Préfet des Etudes monte sur l’estrade et commence (en français !) la lecture du "Catalogue" (Résultat des examens de passage tenu jusque là secret et qui va indiquer à chaque élève dans quelle classe il sera cette année). Seuls les 6mes sont tranquilles : pas d’examen de passage pour eux, ils rentrent directement en 6mes sur inscription , mais ce sera la seule année !
A l’énoncé de son nom chaque élève va se ranger derrière son régent, et la salle se vide peu à peu, classe après classe. " Il est de bon ton de ne pas avoir l’air surpris quand on ne passe pas dans la classe supérieure mais certains ne peuvent retenir leurs larmes" .
Une fois la salle vide, le père Recteur accompagne ses hôtes illustres jusqu’à la salle à manger où leur sera servi un petit déjeuner. Les élèves, eux, devront attendre la 1ère récréation pour manger quelque chose. Une nouvelle année scolaire commence.

L’ORGANISATION DU COLLEGE
Le système d’encadrement des collèges jésuites et la hiérarchie des classes n’ont guère changé entre le XVIme siècle et les temps modernes ; à un détail près cependant : on se plaint actuellement des classes "trop chargée" , celles de l’Ancien régime pouvaient compter jusqu’à 100 élèves ! !

CADRES ET PROFESSEURS.
Le collège était dirigé par un Père Recteur nommé par le Provincial et changé tous les trois ans. Il a sous ses ordres :
- Un Père Ministre , chargé de "la tenue de la maison"
- Un Père Procureur, chargé de "l’économie et la comptabilité"
A partir de 1594, deux Préfets des Etudes :
- Un Préfet Général qui supervisait l’enseignement ("rien ne s’enseignait, ne se lisait, ou ne s’affichait dans le collège sans son visa")
- Un Préfet des Cours de Lettres qui " assistait aux cours principaux, talonnait les professeurs en retard, présidait les disputes, organisait les examens, recevait les nouveaux, choisissait les livres de lecture et les auteurs étudiés, faisait la discipline" ( Ouf !)
- Les professeurs, qu’on appelle Régents ou Lecteurs , sont tous des Pères, et tout jésuite "passe par les collèges " càd y accomplit un temps d’enseignement ou d’encadrement religieux avant de se destiner à d’autres taches ou .... de demeurer au collège selon les choix de son Provincial.


LES CLASSES.
Le Moyen Age avait complètement ignoré la division par classes, les jésuites s’en firent une règle :
Pour une raison de morale : "Il n’est pas bon que des écoliers d’âges différents soient quotidiennement au contact les uns des autres, leurs préoccupations, leurs jeux, leurs conversations et leurs connaissances des choses de la vie sont trop éloignées ".
Et surtout pour une raison pédagogique : "Ainsi l’écolier ne sera pas découragé car il peut toujours se mesurer avec ceux de sa volée ; et il progressera plus vite car tous les discours du maître et les travaux à lui proposés seront à sa portée. Il ne restera pas de longues minutes à laisser passer telle partie du cours qui s’adresse aux élèves plus âgés, ainsi gagnera-t-on en temps et en efficacité".


Et de fait, les jésuites étaient réputés pour cela, par exemple ce qui ailleurs était fait en 1ère se faisait chez eux en Seconde, et cela sans forcer ni sélectionner leurs élèves, mais selon le principe auquel ils tenaient énormément que "les petites classes doivent être particulièrement bien données car elles préparent les grandes classes". Ils furent ainsi les premiers à concevoir une "école complète", de la "classe de rudiments" (où on apprenait à lire et à écrire) jusqu’à la classe de Philosophie.
Le collège d’Avignon avait 7 classes, de la 6me à la Philosophie.
A partir de 1604, il en aura 10 par dédoublement des 6mes et 5mes.

A noter : La numérotation des classes était déjà la même que la nôtre, sauf qu’on appelait "Philosophie" notre classe de Terminale, "Rhétorique" notre classe de 1ère, et "Humanités" notre Seconde.
Ces deux dernières n’existaient pas dans les collèges non jésuites, qui n’avaient qu’une seule "classe de lettres" avant la philo, classe qui n’était pas obligatoire. Les jésuites, non contents de rendre cette "classe de lettres" obligatoire, la dédoublèrent en deux années (obligatoires !) qu’ils appelèrent Humanités et Rhétorique. Ceci explique cela : leurs élèves avaient un niveau de lettres excellent.

Les classes comptaient chacune de 80 à 100 élèves ! ! ! De 7 à 10 classes à Avignon signifie donc que le collège avait 700 à 1000 élèves.

Selon une convention avec le conseil de ville d’Avignon, pouvait entrer directement en 6me "tout enfant qui savait lire et écrire", mais les pères ont parfois cherché à tourner cette convention, ainsi en 1615 les consuls protestent car les pères font passer un "petit examen à l’entrée en 6me, qui défavorise ceux qui n’ont pas les moyens de tenir un maître en leur maison ". Mais en général , pendant les 200 ans où a fonctionné le collège, les Jésuites ont respecté cette convention démocratique propre à Avignon et accueilli dans leur collège (qui était entièrement gratuit) tous les enfants qui se présentaient.

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